Le sourire de la force tranquille

mathieu

Mathieu Morverand

Gérard Marie, le dernier concurrent, étant arrivé, Mathieu Morverand nous livre sa dernière analyse de la course, l’ultime page du livre de la traversée. Il est temps pour nous de lui rendre hommage pour ses analyses quotidiennes qui nous ont permis de comprendre et, faute d’images, imaginer ce qui se passait en mer. Un grand merci Mathieu !

Longtemps, l’humanité s’est tenue loin du rivage, effrayée par cette immensité insondable et mystérieuse, puis un jour, un audacieux s’est élancé sur un tronc d’arbre… dès cet instant, une autre aventure commençait. Traverser l’Atlantique à la rame n’est pas qu’un défi sportif, chacun s’y engage à la recherche de son propre graal, en quête de ses propres rêves, mais tous vivent une profonde expérience intérieure et initiatique, personne n’en revient vraiment indemne.

Avec le sourire radieux de sa force tranquille, Gérard Marie, 67 ans, a franchi la ligne d’arrivée aux îles du Salut à 20 h 10 heure locale (minuit heure de France métropolitaine), après 83 jours et 22 h. de mer. Sur une mer formée par les Alizés tous proches, il aura pu apprécier hier soir sous les couleurs du crépuscule ses derniers instants de solitude en compagnie de cet océan facétieux qui lui aura joué tant de tours et de détours. Au fil des jours, malgré cette adversité finalement coutumière en cet univers si différent, Gérard en a peu à peu compris le langage, adoptant son rythme à celui des éléments plutôt que de s’y opposer vainement. La mer le lui a bien rendu, le portant sur ses flots vers les Amériques et le nourrissant de façon de plus en plus généreuse.

Sa détermination et son endurance, associées à la sérénité avec laquelle il abordait son propre voyage, auront forcé l’admiration de tous. Gérard a certes réussi à concrétiser son projet océanique, mais il aura en fait été bien plus loin que cela, pour lui-même en repoussant ses limites jusqu’à des frontières qu’il ne soupçonnait certainement pas au départ, mais aussi pour tous ceux qui l’ont observé et découvert que l’on peut encore aller au bout de ses rêves, même les plus ambitieux.

Son mal de terre sera sans doute un peu plus durable que celui de ses amis rameurs qui l’ont précédé de quelques jours, mais il nous tarde de l’écouter nous relater le récit de son épopée. Sans doute en gardera-t-il toutefois un peu pour lui, secrètement, comme pour conserver cette relation si particulière qu’il aura noué avec l’océan. Ces deux-là sont désormais indissociables.

L’horizon ne cessera jamais de nous fasciner, il nous a montré le chemin, d’autres partiront sur ses traces.

A bientôt Gérard et bravo à tous pour cette belle histoire que vous nous avez apportée.

La superposition des positions des rameurs sur la deuxième partie de la traversée

La superposition des positions des rameurs sur la deuxième partie de la traversée

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