J66 – Sur l’Atlantique, le rêve de gens simples

Analyse de Mathieu Morverand, routeur de Rémy et d’Olivier Montiel.

Il est dans la vie d’un être humain des expériences qui transcendent l’existence et qui marquent durablement les consciences. Cette traversée seul(e) au milieu de l’océan constitue sans aucun doute l’une d’entre elles.  Tandis que 7 skippers sur les 18 au départ des côtes sénégalaises en octobre dernier savourent désormais le goût si particulier d’une vie de terrien retrouvée, 11 sont encore en mer et continuent de lutter contre des conditions aux nulles autres pareilles dans toute l’histoire de l’épreuve. Quelle est cette foi si forte qui leur permet de tenir alors que l’on serait mille fois tenté à leur place de déclencher la balise Argos pour mettre un terme à cette galère quotidienne et être rapidement rapatrié sur le continent ? Certains avaient un peu d’expérience de la navigation au large, d’autres pas du tout, mais ceux qui restent sont maintenant tous à égalité, à bord du même bateau, à quelques courants près. Il n’y aucune star parmi la flottille, juste des héros ordinaires qui nous surprennent chaque jour un peu plus par leur étonnante pugnacité, cette aventure atlantique constitue bien le rêve de gens simples mais l’océan leur a malgré tout réservé une configuration digne par sa complexité des plus grands marins.

Positions et courant au 23 décembre

Positions et courant au 23 décembre

L’état physique et parfois moral des heureux marins rentrés au port nous laisse deviner comment nous allons retrouver nos amis, les traits probablement tirés dans le même sens, le regard hagard. Il est temps pour eux de poser l’ancre, le moral malmené par les indécises oscillations de la ZIC est à l’image de leur stock de vivres, au plus bas. Quand les grains et la pluie s’acharnent de manière discontinue, quand ramer contre vents et courants ne sert plus à rien, sinon à vous broyer les épaules, tous les moyens sont bons pour compenser cette adversité, certains trouvent le salut dans la lecture, d’autres dans l’écriture.

Les trois nordistes communiquent entre eux et s’échangent toutes les informations dont ils disposent de la part de leurs soutiens à terre. Ils recherchent, en vain pour l’instant, la porte de sortie de cet infernal maelström, sans doute vers le Sud. Leurs collègues y sont passés il y a quelques jours et les vents de Nord-Est leur ont permis de s’en extirper. Mais pour nos amis assommés par un ciel qui menace de leur tomber sur la tête, le retour de ces vents providentiels, synonyme de fin prochaine du bagne, ne semble pas annoncé avant la fin de semaine. Auront-ils progressé d’ici là ? Nul ne peut leur garantir, ce qui rend les vacations difficiles auprès des rameurs pendus à leur téléphone dans l’attente interminable d’une hypothétique bonne nouvelle. Pas évident en effet le rôle de « routeur, ou de « conseiller » – peu importe la sémantique – ni même celui des proches qui redoutent finalement le moment des vacations tant la crainte de ne savoir trouver les mots justes ou de ne pas disposer de l’information convoitée est prégnante à l’autre bout du satellite. Le maniement des mots peut être en la circonstance une démarche dangereuse.

A la différente du premier peloton, la roulette océanique a été cette fois plus heureuse aux partisans de l’option Sud. Avec une distance magnifique de 87 milles parcourus lors des dernières 24 h dans une veine visiblement très généreuse, Catherine est en passe d’honorer par la réussite de son aventure toute sa communauté de corsaires malouins. On l’attend de pied ferme sous les îles du Salut après-demain. Elle sera suivie de près par Olivier B. dont les soutes débordent visiblement de superbes images de ses nombreuses rencontres au large, et par Philippe qui optimise au mieux ses réglages pour filer le plus droit possible vers la ligne.

Dans leur sillage, Didier navigue enfin dans ce courant sud-équatorial qu’il a tant recherché et dont la quête a motivé chacun de ses coups de rame depuis le départ. Malgré des moments pénibles,, il a fini par y arriver et à faire mentir tous ceux qui auront pu douter de son audacieuse stratégie. Certes, il aura mis un peu plus temps que prévu mais il y est parvenu et a ouvert ainsi une nouvelle voie inédite.

3 réflexions sur « J66 – Sur l’Atlantique, le rêve de gens simples »

  1. est ce que les gens simples ne sont pas rares! ceux la sont bluffants!!! vous admirer me parait trop facile à dire, alors que cette aventure reste la plus belle pour vous! joyeux noel à vous tous!

  2. En ce soir de NOEL trés différent de ce que nous pouvons imaginer,
    nous t’envoyons une affectueuse pensée et nous te souhaitons une belle nuit étoilé.
    La terre et proche, Ton fan club t’attend!
    A trés bientôt
    Danièle et Jean-Louis

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